Entretiens sur l'art avec Lou Masduraud
Confiés depuis 2021 à la critique et commissaire Jill Gasparina, les « Entretiens sur l’art » qui, depuis plus de 20 ans, dessinent une formidable collection de paroles d’artistes, scruteront désormais avec attention la matérialité et les conditions d'émergence des œuvres des artistes invités.
Plans d’évasion, cabinets de contorsion, substances actives, bassins pétrifiants : avant même qu’on expérimente tout contact visuel ou tactile avec son œuvre, les titres que Lou Masduraud donne à ses pièces comme à ses séries indiquent très clairement que son travail oscille entre deux pôles : le développement d’un univers onirique où l’expérience du corps est fondamentale, et une aspiration à engager la sculpture dans une recherche de l’émancipation politique et écologique. S’agit-il d’ailleurs vraiment de deux pôles opposés ?
Si ses œuvres jouent à différentes échelles, celle du bijou, du détail ornemental, du corps, jusqu’à celle du monument, ce sont les fontaines, les soupiraux, et les squelettes qui constituent depuis quelques années les formes récurrentes autour desquelles s’organise son travail artistique. Recherche critique et formelle s’y mêlent librement. Elle a par exemple travaillé, lors d’une résidence à Rome, sur les fontaines de l’époque fasciste ou organisé un atelier participatif avec les habitant·es de Montreuil, destiné à réfléchir par la pratique de la céramique au paysage institutionnel de la commune. La pratique de l’artiste se caractérise également par l’attention centrale qu’elle accorde à la question des modes de production et de leur valeur. Elle a appris, au fil du temps, à maîtriser un ensemble de techniques artisanales (fondre le bronze, tailler le marbre...), autant de méthodes conventionnelles qu’elle subvertit et mêle à des pratiques plus expérimentales, voire punk (et drôle !), comme la patine du cuivre à l’aide de tranches de cornichons. Elle dessine ainsi « une œuvre en forme de continuum entre espace social et intime » (Julien Fronsacq), mais aussi entre écosystèmes et communautés, qui se déploie des sous-sols au grand air.
