Évènement

Nathalie Elemento

Mardi 23 octobre 2007 à 19h

Qui a décrété qu’il était interdit de se servir des sculptures pour s’y asseoir, pour y ranger des livres, y poser des verres ?
Nathalie Elemento (née en 1965) aime observer nos objets quotidiens et surtout le rapport que nous entretenons avec : les histoires que nous nous racontons grâce à eux, les modes de vies, les personnalités qu’ils nous permettent de nous inventer.

Détournement de mobilier, pied de nez à l’objet design : son travail conjugue l’analyse des formes, l’intérêt pour la psychanalyse et l’humour.
La sculpture traditionnelle a été définie comme un objet autour duquel on tourne. Nathalie Elemento, pour sa part, veut faire de la sculpture un objet avec lequel on puisse vivre : qu’on puisse l’utiliser comme table, chaise, bibliothèque, et même pour éteindre et allumer la lumière !

Pour ces nouveaux Entretiens sur l’art de rentrée, Nathalie Elemento sera accompagnée de l’historienne d’art, spécialiste de Picabia, Carole Boulbès.

 

Retranscription de l’entretien du 23 octobre 2007

Catherine Francblin (CF) : Nous étions dans l’atelier de Nathalie, entourées de ses sculptures, quand le titre de cette rencontre, « Des sculptures pour de vrai », s’est imposé avec la force de l’évidence. Cependant, comme toutes les choses nées dans la fulgurance, il n’est finalement pas très facile d’expliciter l’argument proposé ici, car cet énoncé est à la fois simple – on comprend immédiatement qu’il va être question de sculptures – et énigmatique : quel est le rapport entre le vrai et la sculpture ? Si l’on s’en tient à la notion de vérité, ou de réalité, c’est-à-dire aux tables, aux chaises, bibliothèques qui constituent notre environnement ordinaire et dont s’inspire le travail de Nathalie … pourquoi parler de sculptures, mot que l’on a coutume de réserver aux objets intouchables déposés dans les musées, à ces objets intimidants autour desquels on tourne pour les contempler à distance?

Et pourtant, NE affirme très clairement : « Je suis sculpteur »… Pour ajouter aussitôt, comme pour en apporter la preuve: « J’aime l’objet ». Voilà le territoire ambigu que cerne NE. Ou plutôt, voilà la frontière que déplace son oeuvre : la frontière qu’on a l’habitude de tracer entre la sculpture, soustraite à l’univers vulgaire du quotidien, et le meuble, destiné à un usage réel.
Une exposition de NE donne à voir des objets curieux. Ces objets, fortement inspirés du mobilier, et qui semblent, formellement, avoir hérité de l’esthétique constructiviste, ou plus près de nous, de l’esthétique de l’art minimal, pourraient, aussi, compte tenu de leur caractère incongru, s’apparenter à certains objets surréalistes.
Que voit-on ? Des tables en bois à moitié encastrées dans des bibliothèques ou dotées de multiples tiroirs insérés les uns dans les autres, des chaises accrochées aux murs, des interrupteurs géants tout à fait fonctionnels, un radiateur en forme de paravent, des cadres de tableaux chauffants, un bureau qui plie sous le poids d’un dictionnaire, une plante dont le tronc et les tiges sont faites de tubes en métal peint.
NE va vous présenter un diaporama de ses travaux. Elle a classé ses images selon sept angles d’approche, sept entrées qui représentent pour elle un déploiement de l’ensemble de son œuvre sous la forme d’un jeu des sept familles. Cette manière d’envisager la présentation de son travail est significative de l’état d’esprit ludique qui l’anime. Cette relation privilégiée au jeu est un aspect important de son travail de NE, et Carole aura tout loisir d’y revenir.

Carole, tu suis le travail de NE depuis plusieurs années. Qu’est-ce qui t’a, de prime abord, attiré dans sa démarche ?

Carole Boulbès (CB): Ce qui m’intéresse dans l’art, c’est d’abord le merveilleux. L’insolite tient une place importante, et certaines pièces de Nathalie le sont. Autre aspect que je retiens dans le travail de Nathalie : sa faculté d’aller à contre-courant. Peut-être ne sera-t-elle pas tout à fait d’accord avec mes appréciations, mais je trouve qu’elle a une force d’énonciation peu commune aussi bien dans ses œuvres que sa façon d’en parler.
J’apprécie également sa façon d’affirmer qu’elle est sculpteur, affirmation qui n’est pas simple si l’on prend en compte par exemple les écrits de Donald Judd. Ces derniers sont souvent cités lorsqu’on évoque la sculpture de type minimaliste. Ses textes de 1965, De quelques objets spécifiques, renvoient dos à dos la peinture et la sculpture, et affirment que nous sommes dans une société où triomphent les objets en trois dimensions. Donald Judd évoque le thème « d’objet spécifique » pour qualifier sa pratique. Il est alors très étonnant d’être confronté à une jeune artiste qui affirme au contraire être sculpteur et qui ne fait pas d’installations.

CF : Merci pour ce préambule. Nous passons maintenant la parole à Nathalie.

Nathalie Elémento (NE):
 L’important étant d’essayer et non pas de réussir, je vais vous parler d’un concept que je ne suis pas parvenue à faire aboutir : Les sept familles. La raison pour laquelle je n’y suis pas arrivée est due au fait que par essence les cartes s’échangent, les mouvements sont circulaires et n’ont pas d’ordre défini. Mais la présentation de ce soir sera cohérente, aura un début et une fin.
En premier lieu, nous allons aborder l’exposition que j’ai faite à la Galerie Claudine Papillon, Decorum. S’installer et Déranger représentent deux familles. Voici un dessin caractéristique de tous mes centres d’intérêts. Ma vision sur les concepts autour du mobilier, de l’architecture, de la sculpture, etc. s’incarne ici parfaitement : il s’agit de la représentation de ma maison idéale où tout élément s’adapterait à la fois aux parois, à l’intérieur et l’extérieur. S’installer est composé de métal et de résistances électriques : c’est un radiateur. Délivré est une bibliothèque où l’on peut ranger des livres de manière horizontale ou les encastrer dans des socles.

CF : Ils ont donc une valeur fonctionnelle ?

NE : …Quelle que soit l’étagère que l’on possède, on l’utilise mentalement, visuellement, et chacun a sa manière particulière de le faire. La seule chose que nous ayons en commun est que nous y rangeons nos livres. Ce qui m’intéresse est d’analyser la manière d’aborder les choses et le quotidien. Par exemple, nous avons tous l’habitude de ranger nos livres alignés verticalement. Or, les titres sont la plupart du temps inscrits de manière horizontale. Certes, les ranger de manière verticale facilite leur saisie, mais on ne sort pas des livres toutes les cinq minutes. Nous ne sommes pas ici dans la notion de pratique mais dans celle « d’habiter les choses ». C’est le regard que chacun va porter par rapport à ses modes d’habiter qui m’intéresse.

Conjonctions est un petit tableau qui est aussi un radiateur. Il faut évidemment le toucher pour se rendre compte de la chaleur, au risque de se brûler. Le concept de chaleur est lié à celui de l’installation que je qualifierais « de dimension fixe ». J’ai envie d’aller à l’encontre d’une règle établie : celle qui interdit au public de toucher les sculptures. Qui en a décidé ainsi ? Ce n’est pas un propos que je conteste totalement car il faut savoir distinguer les différentes manières de toucher une œuvre. La sculpture a toujours été conçue pour être touchée avec respect. C’est un sens qui va avec celui de percevoir. Il existe des usages du langage, du regard, du toucher…Il me semble donc important de pouvoir les utiliser.
Cette pièce, A bord perdu ou Angle mort, fait référence au tableau et à la dorure. La question ici est de savoir quel bord est véritablement perdu : le doré ou les trois autres ?
Il s’agit ici d’une réflexion sur la décoration. On dit souvent qu’une œuvre d’art chez soi n’a pas pour fonction de décorer une pièce. Mais soyons réalistes, nous ne cachons pas nos œuvres d’art. Et avoir une plante chez soi ne fait pas de nous des jardiniers.

Coupé Collé équivaut à une petite table qui s’emboîte. Cette pièce très cubique, met en scène le concept de la distribution de l’espace. En effet, en termes de comportement, lorsque nous possédons une table basse, nous la mettons généralement au milieu d’une pièce. Tout le monde est autour et se penche au-dessus pour saisir les objets. Cette attitude autour du mobilier est presque la même que celle autour de rien. La place centrale est-elle la meilleure ? N’est-il pas mieux de distribuer les espaces ? Notamment lorsqu’on reçoit ? L’appréciation du don et du recevoir est un concept selon moi très important.

Des livres fait référence au « mouvement n°2 » : après s’être tordu le cou pour prendre un livre dans une bibliothèque, comme je l’ai précédemment expliqué, nous sommes obligés de le remettre en place. Avec cette pièce, non seulement nous n’avons pas à le remettre en place, mais des formes de livres en bois permettent de ranger d’autres objets.

CF : Tu parles souvent des objets en faisant référence aux comportements des gens dans leur habitat. Est-ce une de tes préoccupations principales ?

NE : Il est vrai qu’il n’y a que les gens qui m’intéressent. Ceux qui regardent les tableaux m’intéressent aussi ! (rires). La psychanalyse m’intéresse. Dans le monde de l’art, nous préférons parler de philosophie. Je trouve cela moins vivant. Mais par « psychanalyse », je ne fais pas référence aux grandes théories, que je ne maîtrise d’ailleurs pas. C’est plutôt un rapport intérieur/extérieur, ce que l’on montre ou non, c’est la manière dont on se comporte autour d’un objet, – autour d’une table par exemple.

CF : Il existe également des personnes qui rangent dans leur bibliothèque des faux livres enveloppés dans de belles reliures. Est-ce que ce type de comportement t’intéresse ?

NE : Beaucoup moins, car cela relève de l’apparence. Mais, pour revenir à mon travail, je veux montrer que pour un objet, un petit détail peut lui faire prendre un sens totalement différent. Par exemple, la manière d’ouvrir une porte change complètement la manière d’aborder les choses.

CF : Il m’arrive souvent de demander aux intervenants la dimension des œuvres que nous voyons présentées en photographie. La référence au mobilier dans ton travail évite de poser la question de l’échelle car nous l’imaginons automatiquement. Toutefois, tes « interrupteurs » échappent à cette règle. Ils sont plus grands que dans la réalité.

NE : Il existe en effet deux types d’interrupteurs, le grand, mesurant un mètre sur un mètre, et les petits. Je suis partie de l’histoire de Blanche Neige et les sept nains et ait nommé le grand interrupteur blanc Kasimir, en hommage à Kasimir Malevitch. Les sept interrupteurs correspondant aux sept nains développent l’idée de la couleur. Ces sept interrupteurs de 35 sur 35 cm sont réalisés en sept couleurs différentes et fonctionnent parfaitement.
Allumer et éteindre la lumière renvoie à la question : « Qu’est-ce que cela signifie lorsqu’on presse l’interrupteur et que l’on dit rideau ! La journée est terminée… ». Blanche Neige et les sept nains pourraient être disposés dans une maison qui aurait une chambre bleue, une chambre rose, une verte, etc. Personnellement, si j’avais une maison avec une chambre rose, un salon vert, des toilettes jaunes, j’aimerais avoir des objets et des éléments qui vivent dans la pièce, qui ne disparaissent pas, comme des interrupteurs aux couleurs de la tapisserie.

CF : J’ai précédemment signalé que ton travail était inspiré des constructivistes, de l’art minimal. D’après les images que tu projettes ici, il est clair que tes sources te rattachent aux modernistes comme Malevitch. Mais s’agit-il du peintre ou du sculpteur ?

NE : Malevitch tout simplement. Nous ne pouvons pas séparer l’un de l’autre.

CF : Carole, que t’inspire cette référence de Nathalie à Malevitch ?

CB : C’est beaucoup plus qu’un aveu. Une des œuvres de Nathalie de 1995, intitulée Carré blanc dans cadre blanc est une référence directe au Carré blanc sur fond blanc de Malevitch, exécuté en 1919. Nathalie m’a souvent évoqué la notion de cadre, en me disant que son souci premier était d’en sortir. Malevitch était effectivement sorti du cadre aussi bien dans ses Architectones que dans ses autres réalisations. La référence au blanc, très présente dans le travail de Nathalie, évoque également Malevitch qui écrivait dans un texte de 1919 : « En ce moment, le chemin de l’homme prime par l’espace, le suprématisme sémaphore de la couleur se situe dans son abîme infini. La couleur n’est qu’un outil. »
Nous avons, je pense, une des clés pour saisir le fait que la couleur est souvent absente dans le travail de Nathalie. En revanche, elle affirme que le mélange des couleurs lumineuses produit le blanc. Cela signifie que les couleurs sont latentes dans son œuvre. Elles sont présentes sous la forme d’une synthèse abstraite.
Deuxième aspect : l’humour de Nathalie, à l’exemple du Kasimir blanc, à ne pas confondre avec le personnage télévisuel, héros des jeunes enfants.
Autre référence importante : son amour du travail d’Hélène Gray. Nous sommes ici dans l’architecture et le design moderne. Hélène Gray a réalisé ses pièces les plus spectaculaires et les plus connues dans les années 20. Elle menait de front ses différentes activités, comme la plupart des modernes, que ce soit Le Corbusier ou Prouvé. Ces artistes avaient une conception globale de l’architecture moderne ; ils dessinaient aussi bien des meubles que des tissus ou des tapis.
Enfin, j’aimerais rebondir sur les propos de Catherine, qui notait une sorte de contradiction entre la fait d’être sculpteur, et le fait d’aimer les objets renvoyant au mobilier. Tout ceci se résout très facilement si l’on pense par exemple au travail de Brancusi que Nathalie apprécie également beaucoup. En léguant son atelier à l’Etat, aujourd’hui reconstitué près de Beaubourg, Brancusi nous offre une vision globale de la sculpture dans l’espace. Il ne voulait pas voir son travail démembré ou détruit. C’est aussi une dimension essentielle pour Nathalie et cela se devine lorsqu’on se rend sans son propre atelier : les sculptures qu’elle produit font véritablement parties de sa vie.

NE : Un fond en commun est une autre famille, avec ici une petite pièce Apprendre à marcher. Quand on apprend à un enfant à marcher, par exemple, je me demande qui s’appuie sur l’autre et pourquoi ? C’est ce renversement de situation qui m’intéresse ici.
Héritage familial est une pièce que mon prototypiste, à ma demande, a reproduite de manière impeccable. Ici est entrée en scène la question du modèle ou de la copie.
Pour nous deux est issu d’une réflexion sur la vie dans un petit espace. Où le concept d’habiter prend-il le moins de place ? La réponse est au milieu, mais cela reste invivable car c’est une sculpture.
Le Banquet représente douze tables et deux rallonges principales qui s’emboîtent. Tout ceci correspond un peu à la mémoire des corps qu’il y aurait autour d’une table. Entrent en ligne de compte des notions sociales et de respect. Tout le monde sait par exemple que l’on ne doit pas se tourner le dos. Au bout d’un moment, les gens s’entrecroisent, des groupes se forment….Selon certains, la place de la personne qui trône est la plus importante dans un banquet, etc.
Voici une période plus ancienne de mon travail : Jeux de construction. C’est une période où je travaillais seule, je réalisais tout moi-même, tout était donc très « bricolé ».
Ici, nous avons une chaise qui cherche désespérément son cadre. Après avoir essayé différentes positions, elle finit par découper ce cadre et se pose dessus. Nous retournons ici au concept du socle et en même temps à celui de l’absence du socle, sujet qui me tient à cœur.

CF : A l’époque, tu utilisais des matériaux qualifiés de «pauvres. Ton travail avait une dimension « fait main »…Aujourd’hui, tu fais fabriquer tes objets. Quelle est la différence entre ces deux formes de pratique ? Pourquoi es-tu passée de l’une à l’autre ?

NE : La première différence est que j’ai vingt ans de plus….En réalité, comme je vis réellement avec mes sculptures, je n’aime pas, par exemple, laisser des traces lorsque j’y pose des objets. Mes sculptures sont souvent perçues comme revêtues, alors que, pour moi, elles sont en fait à l’état brut, elles ont leur propre « peau ».

CF : Aujourd’hui, un certain nombre d’artistes « louchent » vers le mobilier. Il devient difficile de circonscrire et de séparer les domaines de la sculpture et du mobilier…

NE : Pour moi, tous les objets, comme les meubles sont des sculptures. Sinon, nous aurions tous les mêmes.

CF :
 Justement Carole, comment, selon toi, le travail de Nathalie Elémento se situe-t-il par rapport à cette pratique actuelle du détournement d’objets ?

CB : C’est un problème de fond. Il est vrai que Nathalie ne souhaite pas produire de readymade. Elle cite peu, hormis peut-être Kasimir. Il n’y a pas de reprise de formes déjà connues. Pour mieux me faire comprendre, je renvoie au travail de Bertrand Lavier, à qui il arrive fréquemment de prendre des objets tout fait et de les assembler. Ou encore Mathieu Mercier qui détourne, transforme des objets … Il existe de nombreux artistes qui citent directement des objets du passé pour les déformer, les détourner. Cette problématique est peu présente dans le travail de Nathalie. Exception peut-être, Nathalie, avec ton projet de travailler sur une œuvre d’Hélène Gray ?

NE : Je travaille effectivement depuis longtemps sur un projet compliqué que je nommerais Hommage à Hélène Gray, car je ne me permettrais jamais de détourner de manière sarcastique son travail.

CB : Le travail de Nathalie se distingue encore une fois dans notre époque où la citation est constante. Elle se situe à distance de ces approches, tout en constatant que tout a été fait dans le musée, et que la maison reste un champ d’investigation intéressant. Cela nous renvoie au concept de mobilier, de design, même si Nathalie conteste ce terme.

NE : Le terme « maison » ne renvoie pas nécessairement au design.

CB : Oui mais ce sont les objets de la maison qui sont concernés.

CF : J’aimerais revenir sur ton rapport à la psychanalyse. Les titres de tes pièces sont subtils ; tu joues avec les mots en permanence. La dimension psychologique que tu donnes à tes œuvres ressort d’ailleurs parfaitement de ta manière d’en parler. D’où vient cet intérêt pour la psychanalyse ? Tu es une grande lectrice, tu réalises des sculptures sur l’idée du livre. Que peut donc apporter à ton travail la lecture de Lacan ou de Mélanie Klein ?

NE : Je pense qu’il est bon de s’observer et de prendre un peu de recul pour savoir ce que l’on fait. Savoir prendre du recul, analyser ce que l’on fait fait avancer. J’ai lu un livre de Jean-Baptiste Pontalis, Passé- Présent, sur les modalités de la perception, de la parole…Quelqu’un raconte que chaque étape du processus de pensée récupère toujours quelque chose de l’étape précédente. Nous ne pouvons pas parler sans avoir d’image, même si l’on ne s’en rend pas compte. Si nous disons par exemple « Toucher », cela signifie « sentir-toucher ». La sculpture relève aussi de certains silences qui sont de l’ordre du visible. Certaines absences sont véritablement visibles. Cela relève de l’arrêt sur images, mais avec la possibilité d’avoir plusieurs angles de vue. C’est pour cela que je pense qu’un objet juste qui raconte quelque chose est perceptible et cela suffit.

CB : Cette dimension est présente dans les titres des œuvres qui sont plein d’humour. Par exemple, Héritage familial, Kasimir blanc, Pour nous deux, Sous le poids de la culture…Je me souviens aussi du journal que tu avais tenu à la Villa Médicis et qui s’intitulait Même pas vrai. J’y ai trouvé un lien avec le titre de notre rencontre de ce soir. Ainsi, nous pouvons comprendre qu’il s’agit de métaphores des relations humaines. Nous l’avons très bien saisi quand tu nous as expliqué le Banquet : au bout d’un certain temps, les gens se tournent le dos, des groupes se forment. C’est également le cas lorsque tu expliques que la table « plie » sous le poids de la culture. Elle plie mais ne rompt pas. Nous sommes donc sans cesse dans un jeu métaphorique, que l’on comprend plus aisément par le biais du titre, bien qu’il ne soit pas totalement clair. En juxtaposant tous les titres, on aurait un récit très énigmatique.

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Intervenants

Nathalie Elemento
Carole Boulbès

Date
Horaire
19h00
Lieu
Fondation Pernod Ricard
1 cours Paul Ricard
75008 Paris
Entrée libre
Catherine Francblin et l'artiste Nathalie Elemento
Catherine Francblin et l'artiste Nathalie Elemento

Prochainement

À l'auditorium 
Mercredi 22 mai 2024 à 19h

Entretiens sur l'art avec Cindy Coutant

Confiés depuis 2021 à la critique et commissaire Jill Gasparina, les « Entretiens sur l’art » qui, depuis plus de 20 ans, dessinent une formidable collection de paroles d’artistes, scruteront désormais avec attention la matérialité et les conditions d'émergence des œuvres des artistes invités.

À la librairie 
Samedi 25 mai 2024 à 17h

Lancement de Pour des écoles d’art féministes ! 

de 15h à 17h, à Bétonsalon
Lancement de l’ouvrage La Part affective (Paraguay Press) de Sophie Orlando et conversation avec Émilie Renard et Elena Lespes Muñoz.

de 17h à 18h30, à la Fondation Pernod Ricard
Lancement de Pour des écoles d’art féministes ! (2024), ouvrage collectif coédité par l’ESACM et Tombolo Presses
avec T*Félixe Kazi-Tani, Gærald Kurdian, Sophie Lapalu, Vinciane Mandrin, Michèle Martel, Sophie Orlando, Clémentine Palluy, Émilie Renard et Liv Schulman.