Évènement

<input> Rencontre avec Charlemagne Palestine

Mercredi 10 avril 2024 à 19h

Confié à Julien Bécourt, le cycle célèbre l’union entre les arts visuels et les arts sonores.
Rencontre avec l'artiste Charlemagne Palestine à 19h, suivie d’une performance-surprise.

"Artiste total et prophète du « maximalisme », Charlemagne Palestine est un inimitable pianiste-performer-chamane qui ne se sépare jamais de ses animaux en peluches et de ses foulards, incarnations symboliques des peuples opprimés et des victimes de la Shoah. Né Charles Martin en 1947 à Brooklyn, il est né de parents juifs ukrainiens, originaires d’Odessa et réfugiés aux États-Unis pour échapper au génocide. Dès l’âge de huit ans, il chante dans la chorale de sa synagogue qui l’oriente vers une approche spirituelle de la musique.  

A treize ans, il s’inscrit au College of Arts & Music de Manhattan, où il pratique l’accordéon, le piano et le chant. Revêche à l’autorité, il ne tarde pas à faire les 400 coups et traîne ses guêtres avec Gregory Corso et Allen Ginsberg, poètes emblématiques de la Beat Generation. Par l’intermédiaire du père de sa petite amie de l’époque, il devient le carillonneur officiel de l’église protestante Saint Thomas, à deux pas du MOMA, où il mêle ses propres compositions à des hymnes traditionnels. Un attroupement se crée dans la rue dès qu’il se met à marteler les cloches. Il attire l’attention de Moondog autant que du violoniste d’avant-garde Tony Conrad, qui lui propose de participer à la bande-son d’un film underground Coming Attractions (1969) et l’intronise à la Factory de Warhol. Il côtoie alors les compositeurs dits « minimalistes » - La Monte Young, Philip Glass, Terry Riley – et découvre la peinture de Mark Rothko, Barnett Newman et Clyford Still qui l’influencent considérablement. « Comme Rothko et Still l'avaient trouvé en peinture, je voulais trouver dans le son un champ baigné de couleur, un temple de la couleur, un sanctuaire de la couleur, un son sans fin », déclarera-t-il.  

En quête d’une musique rituelle et chamanique, il ramifie le chant amérindien, la musique klezmer et la musique carnatique, étudiée auprès du maître du Râga indien Pandit Pran Nath. Il s’intéresse simultanément aux expérimentations sur bandes et à la musique électronique en plein essor (Tod Dockstader, Edgar Varèse, Pierre Henry, Iannis Xenakis, Karlheinz Stockhausen, AMM…). Encouragé par le compositeur Morton Subotnick qui l’invite à enseigner à l’école de CalArts en 1970, il poursuit sa quête du « Golden Sound » à travers les oscillations du synthétiseur modulaire Buchla. A l’université, il se prend de fascination pour la richesse harmonique de ses futurs instruments de prédilection : l’orgue et le piano Bösendorfer. Il oriente alors ses recherches vers des sonorités plus acoustiques, mais toujours dans un même but : percer le "secret" du continuum sonore. Sa composition Strumming Music, du nom de la technique de martèlement des touches du piano qu’il développe à l’époque, devient la pièce-maîtresse de sa discographie.  

C’est en Californie qu’il débute dans le monde de l’art et entame une collaboration avec la danseuse Simone Forti et réalise ses premières performances « institutionnelles » à l’invitation d’Allan Kaprow. De retour à New York, il entame un cycle de performances filmées intitulé Body Music et compose Four Manifestations on Six Elements, une pièce pour piano et électronique. En réaction à l’académisme et influencée par le mouvement Fluxus, ses happenings iconoclastes tranchent avec la solennité upper class de l’avant-garde, dont John Cage et Merce Cunningham sont alors les figures de proue. Invité à performer au loft de Cage, il produit une performance chamanique et provocatrice qui lui vaut d’être banni du cercle des compositeurs « sérieux ». Amer et acrimonieux, jugeant la musique de Philip Glass et Steve Reich vendue au commerce et dénuée de spiritualité, il connaît une longue traversée du désert. En 1981 il déclara même vouloir abandonner la musique pour se consacrer exclusivement aux arts visuels.  

Il finit par trouver refuge en Europe où ses compositions, propices à susciter la transe, rencontrent un écho plus favorable. En 1987 il réalise pour la documenta 7 à Kassel la pièce God Bear, un ours en peluche à trois têtes et deux corps de 6 mètres de haut, reprenant l'un des éléments centraux de son œuvre visuelle : les animaux en peluches, inséparables de ses performances musicales. En 1996, avec la réédition sur disque de ses pièces majeures, sa carrière reprend du poil de la bête. La scène underground (Pan Sonic, Sonic Youth, Swans, Pita) qui revendique son influence, participe à sa réhabilitation. Sa rencontre avec sa compagne et son installation à Bruxelles a ouvert depuis de nouvelles voies à son œuvre musicale et plastique qui ne cesse de proliférer à Charleworld, son atelier de 400m2, royaume des divinités en peluche qui y sont agglomérées du sol au plafond. Que gloire soit rendue au « Bordel Sacré » de Charlemagne Palestine !"

Julien Bécourt 

Date
Horaire
19h00
Lieu
Fondation Pernod Ricard
1 cours Paul Ricard
75008 Paris
Entrée libre
Catalogue de l'exposition personnelle de Charlemagne Palestine "AA SSCHMMETTRROOSSPPECCTIVVE", BOZAR, Bruxelles, 2018, éditions MER. B&L.
Catalogue de l'exposition personnelle de Charlemagne Palestine "AA SSCHMMETTRROOSSPPECCTIVVE", BOZAR, Bruxelles, 2018, éditions MER. B&L.

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